Philippe Busquin Commissaire européen chargé de la Recherche Science, culture et enseignement supérieur convergent dans l'espace européen de la recherche

十月 24, 2003

Ouverture de l'année académique 2003

Monsieur le Recteur, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,

C'est un très grand plaisir, pour moi, d'ouvrir cette année académique 2003 à l'Université de Gênes.

Avant tout, je voudrais vivement remercier le Recteur Sandro Pontremolli et le Président Adriano Giovanelli de m'avoir invité à m'exprimer à cette occasion.

Comme vous le savez, c'est à l'Université que j'ai commencé ma vie professionnelle. Avant d'entrer dans la vie politique, j'y ai passé plusieurs années qui m'ont profondément marqué.

Tout au long de ma carrière politique, au niveau national puis européen, jamais je ne me suis éloigné de l'Université, m'efforçant de conserver avec elle et ceux qui y travaillent un lien étroit.

Autant vous dire que je réalise parfaitement l'importance de ce moment très particulier dans la vie universitaire qu'est l'ouverture d'une nouvelle année académique.

Parce que c'est l'occasion d'accueillir une nouvelle génération d'étudiants, bien sûr, dont le renouvellement continu fait de la vie académique une heureuse succession de commencements.

Mais aussi celle de fixer les ambitions pour les 12 mois qui viennent, de déterminer sous quel signe l'année qui s'ouvre devrait se dérouler.

Sous quel signe l'année académique 2003 pourrait-elle se passer, à l'Université de Gênes comme dans bien d'autres universités?

Les signes dans le ciel, c'est l'affaire des devins, mais aussi des marins, ce n'est pas à Gênes que je dois le souligner.

Il y a plus de 500 ans à présent, un très fameux marin, et le plus illustre des citoyens génois, ouvrait en même temps à l'Europe et à la connaissance de nouveaux horizons.

Pour l'Université, l'institution en charge de la connaissance, de sa production et de sa transmission, quel est aujourd'hui l'horizon?

Dans une large mesure, cet horizon c'est l'Europe, c'est précisément le thème que je voudrais développer devant vous cet après-midi.

Je vous présenterai successivement des réflexions sur trois points étroitement liés:

  • L'Europe de la connaissance;

  • Les universités dans la recherche européenne;

  • L'avenir des universités en Europe.
L'Europe de la connaissance

Il y a une semaine, à Bruxelles, sous la Présidence de l'Italie, se déroulait la première réunion de la Conférence Intergouvernementale sur l'avenir de l'Europe.

Son objectif, qui était aussi celui de la Convention, est de déterminer l'architecture et la manière de fonctionner de la future Europe à 25 membres ou davantage.

Au plan institutionnel, comme on dit familièrement, "L'Europe bouge".

Mais pas seulement sur ce plan. Avec le temps, le contenu du projet européen évolue aussi, et s'enrichit.

Au Conseil européen de Lisbonne de mars 2000, l'Union européenne s'est fixé pour objectif de devenir d'ici 2010 "l'économie de la connaissance la plus compétitive et dynamique au monde".

Cet engagement à développer en Europe l'économie et, plus généralement, la société de la connaissance, met au coeur du projet européen la réalisation de l'Europe de la connaissance.

L'Europe de la connaissance, c'est à dire celle de la recherche scientifique, de l'éducation et de la formation, des technologies de l'information et de la communication, et de l'innovation technologique.

Et au coeur de l'Europe de la connaissance se trouvent par définition les universités.

Du fait de leur double mission de recherche et d'enseignement; le lien intime entre leurs activités dans ces deux domaines est même ce qui les définit spécifiquement comme institutions, depuis la réforme de Wilhem von Humboldt.

Mais aussi de leur place croissante dans le processus d'innovation, notamment au niveau régional et dans la dynamique du développement local.

Au moment où elles se voient ainsi appelées à jouer un rôle clé dans la réalisation du projet européen, les universités européennes font face à de nombreux et importants défis.

Défi démographique, avec une population étudiante de plus en plus importante sous l'effet d'une demande croissante de formation supérieure; défi de l'interdisciplinarité grandissante des connaissances, pour l'enseignement comme pour la recherche.

Concurrence de plus en plus aiguë des universités entre elles, pour attirer les financements publics et privés et les meilleurs étudiants et chercheurs; concurrence avec les grandes universités américaines, dont l'attrait pour les talents européens ne faiblit pas.

Et les problèmes de propriété intellectuelle et d'exploitation des résultats, aussi, ainsi que, de manière générale, cette question clé: comment l'Université peut-elle s'adapter à un environnement changeant, jouer au mieux son rôle au centre de l'économie de la connaissance, sans perdre ce qui fait ses atouts spécifiques.

L'idée fondamentale, qui sous-tend tout ce que l'Union européenne entreprend dans ce domaine, est que tous ces défis seront le mieux relevés si on les aborde au niveau européen.

On peut aisément le montrer dans le domaine de l'enseignement. Depuis plusieurs années, l'Union est occupée à bâtir un "Espace européen de l'enseignement supérieur", dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler le "processus de Bologne".

La récente conférence ministérielle de Berlin a permis de franchir une étape supplémentaire sur le chemin d'une plus grande équivalence, d'une meilleure reconnaissance mutuelle et d'une harmonisation des formations universitaires dans la "Grande Europe".

Les universités dans la recherche européenne

Pour illustrer mon propos, je me concentrerai toutefois sur le domaine dans lequel j'exerce des responsabilités, celui de la recherche.

Le développement, en Europe, de l'économie et de la société de la connaissance, suppose en matière de recherche un important effort sur trois plans:

  • L'établissement d'un cadre européen;

  • Un renforcement des moyens financiers;

  • Le développement de l'excellence de la recherche et de l'exploitation de ses résultats.
A ces trois objectifs correspondent les trois grands axes de l'action de l'Union européenne:
  • La réalisation de l'Espace européen de la recherche, à la fois "marché intérieur" de la recherche et espace de coordination des politiques nationales de recherche;

  • Dans ce cadre, l'augmentation de l'effort européen global de recherche jusqu'à 3% du PIB de l'Union (aujourd'hui d'environ 2% du PIB, contre 2,8% aux Etats-Unis et plus de 3% au Japon).

  • Le soutien à l'excellence scientifique et à son renforcement.
Toutes les dimensions et les aspects de la recherche sont abordés dans ce triple cadre et de ce triple point de vue: les infrastructures de recherche, les grandes initiatives technologiques et industrielles, etc,

J'évoquerai plus particulièrement trois aspects intéressant tout particulièrement les universités:

  • La recherche fondamentale;

  • Les ressources humaines;

  • L'innovation technologique au niveau régional.
La recherche fondamentale

Lorsque sont nées les politiques de recherche, dans les années qui ont immédiatement suivi la deuxième guerre mondiale, l'accent était mis sur la recherche fondamentale.

Progressivement, cet accent, et avec lui les financements, privés mais aussi publics, s'est déplacé vers la recherche appliquée et le développement technologique et industriel.

Aujourd'hui, la distinction recherche fondamentale/recherche appliquée a perdu de son caractère tranché. Elle a toutefois conservé son sens et l'essentiel de sa pertinence.

Il est par ailleurs à présent de plus en plus clairement reconnu et affirmé:

  • Premièrement, que c'est en réalité largement sur la recherche fondamentale que repose le progrès économique et social, que cette recherche constitue un facteur clé de la compétitivité économique et de l'amélioration de notre qualité de vie.

    Laser, rayons X, semi-conducteurs, algèbre de Boole et fractales, aujourd'hui exploités dans les systèmes informatiques: les exemples ne manquent pas. Et l'on sait à quel point les progrès dans le domaine de la santé reposent sur les percées réalisées en biologie moléculaire, en neurosciences ou en immunologie.

  • Deuxièmement, qu'il est de la mission essentielle des pouvoirs publics de soutenir ce type de recherche.
Au sein de la communauté scientifique, un consensus se dessine aujourd'hui au sujet de la nécessité de mettre en place au niveau européen un fond de financement de la recherche fondamentale.

Pour renforcer la recherche menée en Europe, toutes les initiatives de coopération scientifique et technologique européenne, y compris le Programme-Cadre de recherche de l'Union, ont jusqu'ici essentiellement exploité un aspect de la dimension européenne: la coopération et la mise en réseau.

Les efforts engagés en ce sens depuis de nombreuses années ont culminé avec l'introduction, dans le sixième Programme-Cadre, de nouveaux modes de soutien, comme les réseaux d'excellence.

L'Université de Gênes participe d'ailleurs significativement à ces réseaux et ces projets, dans des domaines comme la robotique et les télécommunications, les neurosciences ou la biotechnologie, avec le développement de bio-senseurs.

Et elle a développé toute une réflexion utile sur la meilleure manière de mettre en oeuvre ces nouveaux instruments.

A présent, il s'agit d'exploiter un autre aspect, complémentaire, de la "valeur ajoutée européenne", une autre dimension, si j'ose dire, de cette dimension.

Laquelle? Le renforcement de l'excellence par la mise en compétition des chercheurs et des équipes au niveau européen, exactement comme les équipes universitaires, aux Etats-Unis, le sont pour les financements fédéraux de la National Science Foundation ou des NIH.

Cette idée de renforcement de l'excellence par la compétition, pour aider à décloisonner les systèmes nationaux, est l'idée clé émergeant du débat au sujet d'un "Conseil de recherche européen " pour la recherche fondamentale qui se déroule actuellement.

A ce débat, la Commission contribuera très prochainement en présentant, d'ici la fin de l'année, ses vues sur la recherche fondamentale en Europe, et ses enjeux.

Les ressources humaines

Un mot à présent sur les ressources humaines pour la recherche. Elle concerne directement les universités, où travaillent plus d'1/3 des chercheurs européens. Dans ce domaine également, la politique de recherche de l'Union européenne possède plusieurs dimensions.

Pour stimuler et soutenir la mobilité des chercheurs en Europe, l'Union a depuis longtemps recours au soutien financier. Avec le sixième Programme-Cadre, les moyens affectés à ce domaine se sont encore accrus, doublant quasiment, et les formules de bourses se sont multipliées.

Une enveloppe de €1,69 milliards est, de fait, affectée à cette action, qui permettra d'allouer des bourses à plus de 8.000 chercheurs en Europe, pour un volume total d'activités qui pourrait atteindre 12.000 années de recherche.

Avec le projet d'Espace européen de recherche, l'effort s'est de surcroît porté sur les conditions d'environnement réglementaire et légal de la mobilité.

Une proposition de directive pour un titre européen d'accès et de séjour de chercheurs de pays tiers en Europe est ainsi en préparation. Elle sera présentée par la Commission au mois de novembre.

Une étape supplémentaire a récemment été franchie avec une initiative de la Commission sur le thème des carrières: conditions de recrutement et déroulement des carrières, formations doctorales, etc.

Un premier pas dans ce domaine a été la mise en place d'un portail électronique d'information sur la situation et les paramètres clés des carrières en Europe.

Avec le temps, il devrait se transformer en un véritable instrument de stimulation de l'ouverture des carrières et des recrutements à l'échelle européenne.

D'autres initiatives proposées par la Commission sont, par exemple, l'établissement d'une "Charte du chercheur européen", cadre pour la gestion des carrières, et le développement d'un "Code de conduite" pour le recrutement des chercheurs.

Le 17 juillet, à l'Institut Universitaire Européen de Florence, une conférence a eu lieu sur ce thème, rassemblant des personnalités des Etats membres et des pays adhérents, bientôt membres de l'Union.

Tant les analyses de la Commission que les mesures qu'elle propose y ont été très chaleureusement accueillies.

L'innovation technologique au niveau régional

Un mot, enfin, de la question de l'innovation technologique eu niveau régional.

On le sait, une dimension importante du processus d'innovation est la dimension régionale.

Les universités jouent sur ce plan un rôle absolument déterminant, avec les parcs scientifiques, la création de sociétés start up et de spin off, et leur potentiel de transfert, dans le tissu économique et les entreprises, des connaissances et des technologies les plus avancées.

Tout l'enjeu et le défi, pour les universités, est de maximiser leur rayonnement local et de prendre en compte les besoins des régions où elles sont établies, sans mettre en danger le niveau d'excellence et d'insertion au niveau international qui leur sont précisément indispensables pour avoir un impact sur le dynamisme régional.

L'Université de Gênes, solidement ancrée dans la région de Ligurie, a certainement ici de nombreuses expériences à partager.

L'Union a lancé plusieurs initiatives visant à soutenir le développement de partenariats régionaux et locaux en matière d'innovation technologique dans un cadre européen.

Dans le Programme-Cadre ou en liaison étroite avec lui, dans le cadre, notamment, du Plan d'action mis en oeuvre pour aider à atteindre l'objectif 3 %.

Au titre des plus récentes, je mentionnerai l'action pilote "Régions de la connaissance", destinées à soutenir des initiatives en matière:

  • De prospective et d'audit de la recherche;

  • De création, par les universités, de sociétés "spin-off" et d'incubateurs, en coopération transrégionale;

  • De mise en réseau de régions avancées et en retard au plan technologique;

  • D'information et de sensibilisation.
L'avenir des universités en Europe

J'aurais pu évoquer bien d'autres aspects de l'environnement et de l'activité des universités qui gagnent à être abordés au niveau européen, qui nécessitent même de l'être à ce niveau.

Un des plus important, ce sont les relations de l'université avec la société, et leur rôle dans la formation des professeurs de science et l'amélioration de la connaissance de la science par le public.

Cette question fait l'objet d'une grande attention dans le Plan d'action "Sciences et société", qui couvre des thèmes comme l'enseignement des sciences et le dialogue des chercheurs avec la société.

Ici aussi, je me félicite de voir votre université, la ville de Gênes et la région Ligure, s'impliquer dans une initiative comme le "Festival de la science".

Tous ces aspects sont évoqués dans la Communication présentée par la Commission au mois de février dernier sous le titre: "Le rôle des universités dans l'Europe de la connaissance".

Elle a donné lieu à un large débat au sein de la communauté universitaire européenne, et parmi tous les partenaires des universités, plus d'une centaine d'organisations ayant réagi par des contributions.

Les questions plus particulièrement liées à la recherche seront débattues à l'occasion d'une conférence qui se tiendra à Liège au mois d'avril prochain sous l'intitulé "Une vision de l'Université basée sur la recherche et l'innovation".

Vous êtes bien sûr cordialement invités à y participer.

Monsieur le Recteur, Mesdames, Messieurs

Ce matin, je visitais avec beaucoup de plaisir une exposition sur Gregor Mendel et ses travaux pionniers de génétique.

Et je me faisais la réflexion suivante: Gregor Mendel, qui n'a pas été accepté à l'Université de Vienne, a mené tous ses travaux sur l'hybridation, qui ont jeté les bases de la théorie de l'hérédité, au Monastère de Bruun, auquel il appartenait.

Mais s'il vivait aujourd'hui, il est presque sûr que c'est dans une université qu'il se trouverait.

Et c'est dans les universités, là où la science la plus avancée et la réflexion philosophique et sur les questions de société sont en contact étroit et permanent, que se développe à coup sûr la réflexion sur les enjeux sociaux et éthiques des formidables progrès auxquels ses découvertes ont ouvert le chemin.

Les universités font partie intégrante de l'héritage européen, ce sont en vérité en grande partie elles qui ont fait l'Europe.

Autant que son passé, elles représentent son avenir.

On prête au célèbre Génois que j'évoquais en commençant (Christophe Comob, bien sûr), la phrase suivante: "Meno sai dove devi andare, più andrai lontano".

Peut être a-t-il même vraiment dit cela, rien ne le garantit.

Une chose est en tous cas certaine: dans le cas des universités et de l'Europe de la connaissance, c'est exactement le contraire qui est vrai: nous savons que nous allons aller loin, mais nous irons d'autant plus loin que nous saurons précisément où aller.

Et c'est ensemble que nous devons le déterminer.

Je vous remercie de votre attention.

DN: SPEECH/03/483 Date: 23/10/2003

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